Extrait revue meet n°07

Alger / La Havane

LEONARDO PADURA

Sonatine pour Rafaela

Rafaela ferma les yeux. Elle sentit la goutte de sueur qui s’était formée sur son cou tomber entre ses seins, faire une pause, récupérer ses forces et sa rondeur pour se lancer sur son ventre. Elle maudit la chaleur, l’autobus qui n’arrivait pas et aussi le reflet du soleil sur la chaussée qui blessait ses pupilles. Je dois avoir l’air d’une vraie loque ; elle sortit de son sac à main un petit mouchoir imprégné d’extrait de violette et s’en effleura les lèvres et le front. Elle soupira, voilà enfin ce sacré bus.

Traduit de l’espagnol (Cuba) par Elena Zayas.

Sonatina para Rafaela

Rafaela cerró los ojos. La gota de sudor le había nacido en el cuello, sintió cómo se desprendía hacia sus senos y, luego de una pausa, recobraba fuerzas y volumen para lanzarse por su vientre. Maldijo al calor y a la guagua que no pasaba y también al reflejo del sol sobre el pavimento, le hería las pupilas. Debo parecer un guiñapo, y sacó de la cartera un pañuelito rociado con extracto de violetas y se tocó apenas los labios y la frente. Suspiró, ahí viene la dichosa guagua.

BACHIR MEFTI

La dernière nuit d’un siècle déchu

La vie des artistes qui vont jusqu’au bout de leurs rêves m’a toujours exalté. Mais la vie est vaine, et je la vois comme un soir qui se consume, alors que je demeure là, impuissant face au déclin du jour, du haut de ce balcon donnant sur la mer. Quelque chose en moi réclame la délivrance ; un volcan en moi soudain se met à gronder. Après quelques heures d’un sommeil furtif, je me réveille, affligé par le silence du lieu, désarmé, et avec pour seul destin l’attente de ce qui n’aura sans doute jamais lieu.


Traduit de l’arabe par Linda Touchi-Benmansour